En 25 ans, le logo du festival Coquelicontes n’a pas changé d’un trait.
Concevoir l’identité et l’univers graphique de Coquelicontes
Créé en 1997, Coquelicontes est un festival régional. Déployé à l’origine sur les trois départements du Limousin (Corrèze, Creuse et Haute-Vienne), Coquelicontes ne se déroule plus qu’en Corrèze et en Creuse depuis 2020 mais n’en reste pas moins l’un des plus importants festivals de conte de France.
Le festival fédère les initiatives des différentes structures, telles les bibliothèques départementales, pour promouvoir la littérature orale et crée un maillage territorial culturel au plus près des habitants grâce à l’itinérance des artistes. Chaque printemps (en automne en 2021), durant deux semaines, il fait donc rayonner le conte sur le territoire limousin.
Coordinateur du festival jusqu’en 2019, le Centre régional du livre en Limousin m’a commandé la création de l’identité visuelle et la réalisation de l’ensemble des documents de sa première édition : illustration de l’affiche, conception et mise en forme du programme, dossier de presse…
Le cahier des charges contenait toutes sortes de livrables… mais pas de logo. Cette « petite chose », censée cristalliser l’essence du festival et sans laquelle asseoir son identité dans le temps est impossible, n’était pas une évidence aux yeux des commanditaires.
Alors, logo ou pas logo pour le festival Coquelicontes ?
Nous pouvons toujours revenir sur les récents débats sur l’uniformisation des logos des marques de prêt-à-porter à travers le choix délibéré de polices de caractère neutres et passe-partout.
Mais alors que le nom d’une marque prestigieuse suffit à lui seul à sa reconnaissance, un festival, une entreprise naissante ne peuvent pas se passer de signe distinctif. À plus forte raison pour un festival qui, par nature, est amené à changer de visuel et donc en quelque sorte d’univers graphique à chaque édition.
Coquelicontes : le symbole, l’emblème, l’attachement affectif
Coquelicontes est un festival organisé pour des lieux de spectacles vivants à l’échelle humaine dans une région essentiellement rurale.
Le nom du festival évoque un moment agréable, de détente : le printemps avec le réveil de la nature et le conte comme instant intime, magique, nostalgique et réconfortant. C’est une forme de retour à l’enfance, authentique et non commerciale.
Le coquelicot à l’image de l’art de conter
Le coquelicot est une plante sauvage à fleur rouge, fragile et éphémère. Quatre pétales veloutés en forme de cœur ornent des étamines noir bleuté. En son centre, la capsule (le fruit) laisse échapper ses graines prêtes à coloniser de nouvelles contrées.
Aussi, tel un lien métaphorique, conter, raconter des histoires – à un public de tous les âges – constituent un art traditionnel et populaire dont la nature orale pousse à l’improvisation au contact du public.
Les quatre cœurs, par analogie de forme, symbolisent les pétales mais surtout l’émotion que le conteur fait confluer vers le public.
À cette phase de la conception du logo du festival Coquelicontes, j’ai cherché à représenter le public et l’artiste en cercle pour donner le sentiment de convivialité.
Progressivement, l’un des cœurs va s’installer au centre : à la fois « conteur » et conte captivant.
Les pétales vont fusionner pour, au final, dessiner le cœur (l’histoire palpitante) dans la contre-forme.
Voilà un bon logo : la forme est analogique, facile à décrire, facile à mémoriser.
La couleur l’est tout autant : rouge vif !
Le sens est évident : s’ouvrir généreusement, inviter à partager un délicieux moment, accueillir. Transmettre : disperser les graines (des contes et des histoires) qui refleuriront l’année d’après.
Le logo de Coquelicontes est distinctif, authentique et sincère.
Un logo lové au cœur d’une police de caractère ronde et accueillante
Le titre du festival, conçu pour être utilisé en têtière, est constitué d’une police de caractère ronde, accueillante, distinctive, en adéquation avec la morphologie du coquelicot. Il s’agit de la Nueva.
Un contraste très élevé de son trait souligne la fragilité de la fleur, tandis que les jonctions des arcs des h, m, n, r, b, d, p et q sont basses et caractéristiques de polices calligraphiques ; les panses sont arrondies et les fûts effilés. C’est ce qui rend cette police distinctive.
Avec un aspect « fait main », elle donne un sentiment de proximité, de convivialité et de cordialité.
À l’époque de la création du logo, la Nueva était l’une des rares polices au format Multiple Master. Ce format offrait une multitude de possibilités à l’image des fontes variables apparues depuis 2016.
Si la police est indissociable de l’identité, c’est surtout la partie iconique qui est devenue le véritable symbole du festival : son logo.
Rapidement, les organisateurs du festival ainsi que tous leurs relais se sont approprié l’icône du coquelicot avec sa forme en cœur et sa couleur éclatante.
Au fil des années, le public – souvent fidèle et en attente des éditions suivantes du festival – a tissé un lien affectif fort avec le symbole, au point que ce dernier est devenu beaucoup plus qu’un objet graphique.
Par sa symétrie, sa rondeur et sa bonhomie, la structure du logo semble conçue pour résister au temps. Depuis vingt-cinq ans, sans la moindre retouche, il continue donc à identifier le festival en accompagnant l’itinérance des conteurs à la rencontre d’un public plus fidèle que jamais.
Le dernier festival a eu lieu du 28 septembre au 10 octobre 2021.